Maltraitance envers les aînés: 866 dossiers en un an
(QUÉBEC) Pas moins de 866 cas de maltraitance envers des personnes vulnérables, surtout des aînés, ont été dénoncés dans les établissements de santé du Québec au cours de la dernière année, à la suite de l’application d’une loi toute récente visant à contrer ces abus.
La Presse a analysé les rapports 2018-2019 des commissaires aux plaintes et à la qualité des services qui œuvrent dans la trentaine d’établissements de santé du Québec, principalement les centres intégrés de santé et de services sociaux (CISSS) et les centres intégrés universitaires de santé et de services sociaux (CIUSSS). Les commissaires sont chargés de traiter tous les signalements et plaintes concernant la maltraitance et d’en faire le bilan annuellement. Ils ont hérité de ces nouvelles responsabilités en vertu d’une loi adoptée au printemps 2017. Une loi qui n’a pas assez de mordant pour certains et qui sera révisée par la ministre responsable des Aînés, Marguerite Blais (voir capsules).
Pour la première fois, les rapports des commissaires lèvent le voile, plutôt timidement cependant, sur un phénomène qui reste souvent dans l’ombre.
La maltraitance se montre sous plusieurs visages, démontrent-ils. Un employé qui inflige des sévices physiques ou psychologiques à un aîné hébergé en centre d’hébergement et de soins de longue durée (CHSLD) ; un fils qui abuse financièrement de sa mère âgée ; une personne agressée sexuellement par un voisin de chambre. Les dénonciations ont mené dans certains cas à des sanctions disciplinaires, voire à des congédiements, et à des mesures de sécurité renforcées pour protéger les victimes.
Abus physiques et sexuels
Dans la Capitale-Nationale, la commissaire Dominique Charland dit avoir reçu « un nombre important de plaintes et de signalements de maltraitance qui se sont avérés fondés » depuis que les nouvelles règles sont entrées en vigueur à l’automne 2018. Elle a reçu 20 plaintes et 58 signalements. L’année précédente, il y avait eu à peine trois plaintes et six signalements.
Un employé a été congédié pour avoir maltraité psychologiquement un usager. Dans une autre affaire, et à la suite d’une plainte pour maltraitance physique, le commissaire a dû rappeler « au personnel de tous les quarts de travail l’obligation de respecter le protocole sur l’utilisation exceptionnelle des mesures de contrôle ». Une personne avait été placée en isolement trop longtemps.
La commissaire a également traité un cas de « maltraitance sexuelle ». « L’usager maltraitant » a été « déplacé sur une autre unité avec une surveillance jour-soir-nuit », souligne-t-elle dans son rapport. L’établissement a procédé à « l’installation d’un système infra-rouge à la porte du résident victime ».
Dans environ les deux tiers des cas traités en 2018-2019, les victimes recevaient des services de l’établissement, que ce soit à domicile, au CLSC ou encore en CHSLD. Les autres sont des aînés hébergés dans des résidences pour aînés ou encore dans des « ressources intermédiaires ».
Je suis convaincue que la nouvelle loi assure une meilleure protection aux personnes vulnérables. C’est venu nous donner un levier de plus, nous légitimer dans notre message de mettre fin à la maltraitance. Il y a une vigilance accrue, et ça, c’est très positif.
Dominique Charland, commissaire du CIUSSS de la Capitale-Nationale et présidente du Regroupement québécois des commissaires aux plaintes…
Source: La Presse – TOMMY CHOUINARD – Publié le 14 octobre 2019